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Espace et temps

Jeudi 25 mars 2010 - 08:00 - Vendredi 26 mars 2010 - 18:00
Argumentaire: 

 

Les concepts d'espace et de temps ont beaucoup évolué à la fois au gré des différentes théories physiques et mathématiques et au gré de la pensée philosophique. L'espace et le temps absolus de Newton, encore proches de l'intuition, trouvent une justification dans la construction philosophique de Kant. La thermodynamique, et en particulier le second principe, semble apporter une solution au problème de la direction du temps, auquel la mécanique ne répond pas. L'irruption des géométries non-euclidiennes puis le développement de l'algèbre linéaire ont conduit à une redéfinition du concept d'espace en mathématiques, indépendante de l'intuition. En physique, la relativité restreinte puis générale rendent obsolète l'espace-temps newtonien. Depuis Poincaré, les physiciens se sont attachés à construire espace et temps à partir des propriétés de groupes de transformations. La difficulté à construire une théorie quantique de la gravitation laisse à penser que ces concepts d'espace et temps ne sont pas aboutis. En théorie des boucles quantiques par exemple, espace et temps émergent naturellement de la théorie.


L'objectif du colloque est de réunir des intervenants qui présenteront certaines de ces conceptions modernes ou anciennes de l'espace et/ou du temps. Quels liens existent-ils entre les concepts de l'espace et du temps développés par les mathématiciens, les physiciens et les philosophes ? Faut-il et peut-on résoudre la question de la nature de l'espace et du temps ?

Programme: 

 

Jeudi 25 mars
    Chairman: Léna Soler

  • 9h00 : Christophe Bouriau (Archives Poincaré, Nancy),
    Kant et Poincaré sur l'espace : deux conceptions opposées ou complémentaires ?
    L'objectif de la conférence est de montrer la chose suivante : si la conception poincaréienne de l'espace géométrique peut être lue comme une rectification et un enrichissement de la théorie kantienne de l'espace, à l'inverse, certains éléments de la théorie kantienne pourraient servir à compléter ou à soutenir certains aspects majeurs de la théorie de l'espace de Poincaré, notamment en ce qui concerne la notion /a priori/, avancée par Poincaré, de «groupe de transformations». Cette notion de groupe ne présuppose-t-elle pas elle-même l'intuition /a priori/ de l'espace tel que la définit Kant ?

  • 10h00: Olivier Bruneau (Nantes)
    La question de l'espace et du temps chez Maclaurin : le cas de la figure de la Terre
    Dans son Treatise of Fluxions (1742), Maclaurin s'appuie sur une version du temps et de l'espace pour construire sa théorie des fluxions sans avoir recours à l'infiniment petit. De cette élaboration "axiomatique" découle un certain nombre de résultats mathématiques et physiques. En parcourant rapidement sa version de l'hydrodynamique (critiquée par D'Alembert), nous nous focaliserons sur son traitement de la figure de la Terre. Nous regarderons en quoi ses concepts d'équilibre et de stabilité le poussent à choisir un parti-pris mathématique et à rejeter les idées de Stirling. En guise de conclusion, nous étudierons la lecture que font D'Alembert et Lagrange des figures d'équilibre de Maclaurin.

  • 11h00 : Pause Café

  • 11h30 : Jean Eisenstaedt (Observatoire de Paris)
    La relativité générale au tournant des années soixante
    Les interprétations de la relativité générale, fort diverses, ont parcouru le milieu "relativiste" de la naissance de la théorie aux années quatre-vingt. J'insiterai sur le passage de l'interprétation "néo-newtonienne", longtemps partagée par les experts, à l'interprétation "topologique", aujourd'hui classique, difficilement acceptée. La question de la signification physique des coordonnées, en particulier du temps est centrale dans ce débat ainsi que celle de la consistance interne de la théorie. L'idée de "trou noir" y a joué, bien avant toute observation, un rôle considérable. 

  • Chairman: Christophe Chatelain

  • 14h00 : Christian Maes (Leuven)
    Thermodynamic space-time
    Ernst Mach ended his /Mechanics /with the remark that "purely mechanical problems do not exist" except as an idealization. He argues against isolating different properties of bodies at fixed times. We revisit his /chemical view/ on space-time in the light of some 100 years of quantum mechanics and relativity. We start from (1) Boltzmann's microscopic derivation of the arrow of time, (2) its quantum mechanical analogue, and we discuss (3) their thermodynamic constraints on all cosmological models of space-time. Finally, we compare the chemical view with the apparent nonlocality of nature.

  • 15h00 : Alexis de Saint Ours (Paris VIII)
    La disparition du temps en gravitation quantique : enjeux et significations [PowerPoint]
    La gravité quantique à boucles figure parmi les approches contemporaines de la physique qui cherchent à produire une théorie quantique de la gravitation. Son originalité consiste à prendre au sérieux la révolution conceptuelle inaugurée par la théorie de la relativité générale quant à nos conceptions de l’espace et du temps. Cette dernière n’est pas seulement une nouvelle théorie des champs parmi d’autres mais incarne un saut conceptuel majeur. Cette radicale nouveauté est celle de la « background independence » : l’espace-temps n’est pas un cadre. Ce que recherchent les théoriciens des boucles est la signification physique d’une théorie quantique de la gravitation indépendante du fond. Quelle en est la signification philosophique ? J’essaierai de montrer que cette disparition du temps est avant tout une disparition du temps comme cadre : le temps n’est pas le contenant du devenir, du changement ou de l’évolution. Ce faisant, elle ouvre la voie à une compréhension du temps comme variation et même à l’idée de variation pure au niveau de l’échelle de Planck.

  • 16h00 : Pause Café

  • 16h30 : Claus Kiefer (Cologne)
    Does time exist in quantum gravity ? [PDF]
    Time is absolute in standard quantum theory and dynamical in general relativity. The combination of both theories into a theory of quantum gravity leads therefore to a ``problem of time''. In my talk I shall investigate those consequences for the concept of time that may be drawn without a detailed knowledge of quantum gravity. The only assumptions are the experimentally supported universality of the linear structure of quantum theory and the recovery of general relativity in the classical limit. Among the consequences are the fundamental timelessness of quantum gravity, the approximate nature of a semiclassical time, and the correlation of entropy with the size of the Universe.

  • 17h30 : Philippe Lombard (IECN-Archives Poincaré, Nancy
    L'au-delà de l'horizon
    L'exposé tentera de montrer comment la découverte de la représentation en perspective par les peintres de la Renaissance a permis de maîtriser la géométrie de l'espace et de forger les outils autorisant les modélisations actuelles. 
Vendredi 26 mars
    Chairman: François Chargois

  • 9h00 : Marc Chaperon (Paris VII)
    Sur un théorème de Hawking
    Un théorème de Hawking, exposé dans le livre qu'il a écrit dans sa jeunesse avec Ellis, "The large scale structure of space- time" (Cambridge), est à l'origine, si l'on peut dire, du "big bang". Celui-ci étant devenu une sorte de credo, il n'est pas mauvais de revenir aux sources : un résultat mathématique reposant sur des hypothèses bien précises, dont le domaine de validité peut être discuté. Le conférencier n'a malheureusement pas de compétence particulière en la matière, mais la frontière (mouvante) entre savoir et croire lui semble d'intérêt public.

  • 10h00 : Scott Walter (Archives Poincaré, Nancy)
    L'espace-temps conventionnel, et l'atome du temps chez Poincaré
    Il y a un siècle, les idées traditionnelles de l'espace et du temps furent bouleversées par la théorie de la relativité, dont Henri Poincaré fut un fondateur. Alors que la théorie de Poincaré ne contredit pas celles d'Einstein et Minkowski sur le plan mathématique, la théorie minkowskienne de l'espace-temps se présentait en tant que contre-exemple à la philosophie de l'espace de Poincaré. En réponse, Poincaré proposa de regarder l'espace-temps comme une convention, tel qu'on devait choisir entre les espace-temps de Galilée et de Minkowski. Le choix de Poincaré en faveur de l'espace-temps de Galilée peut être compris dans le contexte de la théorie des quanta, laquelle mettait en cause les mécaniques newtonienne et relativiste, et fit naître chez Poincaré sa notion de l'atome du temps.

  • 11h00 : Pause Café

  • 11h30 : Etienne Klein (CEA, Paris),
    Le temps est-il un cas de conscience ?
    La perception du temps comme un passage, imbriquant le futur, le présent et le passé, nécessite une double opération de la pensée : il faut non seulement distinguer le présent, seul existant, et exclure le passé et le futur, mais aussi - en même temps - appréhender à la fois l'instant présent, l'instant passé et l'instant futur, les penser dans leur appartenance à une même série ; il n'y a pas un instant, puis un autre ; il y en a un, puis un deuxième, puis un troisième. Ce qui suppose que le premier et le deuxième n'existent plus lorsqu'est présent le troisième, mais que quelque chose d'eux demeure qui permet de penser les trois instants comme appartenant à un même tout. L'intervention d'une conscience "intégrante" semble donc nécessaire à la conceptualisation d'un cours du temps qui soit continu et homogène. Est-ce à dire que le cours du temps dépend lui-même de la conscience ? Ou existe-t-il de façon autonome par rapport au sujet conscient ?

  • 14h00-16h00 : Table ronde animée par Alexis de Saint Ours et Catherine Dufour

Colloque co-organisé par trois laboratoires nancéiens: le laboratoire des Archives Henri Poincaré (Philosophie et histoire des sciences), l'Institut Jean Lamour et l'Institut Elie Cartan (mathématiques).

Cathy Dufour, Sandra Mols, Philippe Lombard, François Chargois, Christophe Chatelain, Philippe Nabonnand, Thierry Gourieux, Nicole Bardy, Scott Walter