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REPORTÉ ! // Histoire et philosophie des sciences et des techniques

Jeudi 23 avril 2020 - 10:00 - Vendredi 24 avril 2020 - 18:00
Nancy, MSH Lorraine, salle internationale (324)
Argumentaire: 

Jeudi 23 avril : Philosophie des sciences — Histoire des sciences : quelles relations ?

Vendredi 24 avril : Passé et Présent de la Philosophie des Sciences en France dans un contexte international

Participants: 

Le 23 avril :

Conférenciers : Jacques Dubucs, Mircea Dumitru, Michael Heidelberger, Alexandre Métraux, Léna Soler, Jean-Jacques Szczeciniarz

Table ronde : Andrew Arana, Christophe Eckes, Valeria Giardino, Gerhard Heinzmann, Baptiste Mélès, Ivahn Smadja

Le 24 avril :

Conférenciers : Hourya Benis Sinaceur, Jean-François Braunstein, Charles Braverman, Karine Chemla, Gilles Dowek, Frédéric Fruteau de Laclos, Julien Lamy, Thierry Martin, Laurent Rollet, Sophie Roux, Pierre Wagner

Table ronde : Anastasios Brenner, Nadine de Courtenay

 

Programme: 

 

Jeudi 23 avril

Philosophie des sciences — Histoire des sciences : quelles relations ?

Organisé par Gerhard Heinzmann pour le CNFHPST

10h
L. Soler : Philosophie des sciences - Histoire contrefactuelle des sciences : une illustration en mécanique quantique.

10h45
A. Métraux : Ernst Mach: portrait du physicien en autophilosophe

11h30
M. Heidelberger : Les relations entre la connaissance quotidienne, l'histoire des sciences et la science en elle-même chez Ernst Mach.

12h15 Déjeuner

14h15
J. Dubucs : Trois degrés de l'historicisme"

14h45
J. J. Szczeciniarz : 5 relations entre Histoire et Philosophie des Sciences (identité, contradiction, contrariété, exclusion, incompatibilité, indifférence mutuelle (immédiate, ou construite)).

15h15
M. Dumitru : La philosophie de la science sans histoire de la science est vide, et l’histoire de la science sans philosophie de la science est aveugle. La science entre theories et modèles; perspectives philosophiques et historiques.

15h45-16H15 Pause

16h15
Table ronde : intervenants A. Arana , C. Eckes, V. Giardino, G. Heinzmann, B. Mélès, I. Smadja, Anna Zielinska.

20h Dîner

 

Vendredi 24 avril

Passé et Présent de la Philosophie des Sciences en France dans un contexte international

coorganisée par Karine Chemla et Nadine de Courtenay pour le CNFHPST

Conférence plénière - Pierre Wagner : Réflexion sur l'avenir de la philosophie des sciences

Conférences du matin

Karine Chemla
Des mathématiques enracinées dans une recherche historique et une réflexion philosophique : La généralité en géométrie selon Michel Chasles

Thierry Martin :
Philosophie des sciences et histoire des sciences chez Cournot

Charles Braverman
Une historiographie des études galiléennes en France au XIXe siècle : l'histoire et la philosophie des sciences dans leur production et leur diffusion par des scientifiques

Laurent Rollet :
Comment devient-on philosophe ? Le cas d’Henri Poincaré

Julien Lamy :
Entre physique et psychanalyse: l'épistémologie "hybride" de Bachelard

Conférences de l’après-midi

Frédéric Fruteau de Laclos :
Meyerson et le style historique en épistémologique

Matteo Vagelli : [confirmé]

Sophie Roux
Histoire et histoire des sciences selon Gilles-Gaston Granger

Hourya Sinaceur
Les mathématiques : modèle ou organon pour la philosophie ?

Gilles Dowek
La philosophie des sciences lieu d'un dialogue entre philosophes et scientifiques

Table ronde : Le présent de la philosophie des sciences aujourd’hui en France et ses tendances, avec A. Brenner, Nadine de Courtenay

 

Résumés: 

 

Hourya Benis Sinaceur
Les mathématiques : modèle ou organon pour la philosophie ?

J'essaierai de répondre à cette question à partir des œuvres de Brunschvicg, Cavaillès, Granger, Lautman et Vuillemin. Il me paraît en effet que pour les trois premiers philosophes les mathématiques sont un modèle qui fournit MATIÈRE À PENSER, tandis que pour les deux derniers, les mathématiques sont plutôt un organon, qui permet de préciser les OPÉRATIONS DE PENSÉE.

Charles Braverman
Une historiographie des études galiléennes en France au XIXe siècle : l'histoire et la philosophie des sciences dans leur production et leur diffusion par des scientifiques

Il suffit de citer par exemple Duhem, Koyré, Crombie, Costabel, Taton, Feyerabend, J. Merleau-Ponty, Drake, Clavelin, Biagioli pour se convaincre que les études galiléennes n'ont cessé d’être un continent important de l’histoire des sciences durant tout le XXe siècle. Cette liste d'auteurs suggère aussi la diversité des usages philosophiques potentiels de la figure de Galilée. Ainsi, notre hypothèse est que faire l’historiographie des études galiléennes doit non seulement permettre d’étudier la manière dont l’histoire des sciences s’est développée dans une diversité d’objets et de méthodes, mais également de mettre en évidence des engagements particulièrement variés en terme de philosophie des sciences. Remonter au développement des études galiléennes au XIXe siècle en France ouvre la possibilité d’examiner les conditions de développement de l’histoire et de la philosophie des sciences avant leur institutionnalisation. A l’époque, la participation de certains savants dans la production et la diffusion de représentations de Galilée n’est pas exceptionnelle et met en avant des modes de circulation comme les revues et la création de communautés ayant servi de support au développement de la philosophie des sciences françaises. G. Libri, A.-A. Cournot, J. Bertrand et P. Tannery sont quelques exemples de savants aux profils variés qui ont utilisé la figure de Galilée. En analysant leurs usages de Galilée, nous verrons alors quelles conceptions de la science étaient véhiculées par ses auteurs.

Karine Chemla
Des mathématiques enracinées dans une recherche historique et une réflexion philosophique : La généralité en géométrie selon Michel Chasles

Comme la plupart des praticiens de la géométrie engagés dans une recherche qui conduira à l’avènement de la géométrie projective, Michel Chasles (1793-1880) appuie son travail mathématique sur une réflexion historique et philosophique. Il est en particulier préoccupé, tout comme l’était son aîné Jean-Victor Poncelet (1788-1867), par la question de la nature de la généralité en géométrie. En proposant, dans son Aperçu Historique de 1837, une nouvelle conceptualisation des figures géométriques afin de reformuler, de façon à ses yeux plus satisfaisante, le principe de continuité avancé une vingtaine d’années plus tôt par Poncelet, Michel Chasles inaugure une réflexion sur les objets mathématiques qui aura un impact décisif sur les mathématiques elles-mêmes.

Gilles Dowek
La philosophie des sciences lieu d'un dialogue entre philosophes et scientifiques

Le philosophie des sciences peut être vue comme l'œuvre de philosophes qui s'intéressent aux sciences comme ils s'intéressent à toute autre activité humaine. Elle peut aussi être vue comme l'œuvre de scientifiques qui mènent une activité réflexive sur leurs pratiques. Nous proposons une voie du milieu, selon laquelle la philosophie des sciences est le lieu d'un dialogue entre les uns et les autres. Nous tenterons de comprendre quelles sont les conditions qui rendent un tel dialogue possible, et aussi les limites d'une telle démarche.

Mircea Dumitru
La philosophie de la science sans histoire de la science est vide, et l’histoire de la science sans philosophie de la science est aveugle. La science entre theories et modèles; perspectives philosophiques et historiques.

I discuss the issue of the mutual connections between the two and show that history is philosophically informed and philosophy needs the real back-up from history.

Michael Heidelberger
Les relations entre la connaissance quotidienne, l'histoire des sciences et la science en elle-même chez Ernst Mach

Mach appelait son traité sur « La Mécanique » un « Exposé historique et critique » (il ajoute cette dénomination également aux autres livres comme la théorie de la conservation de l’énergie, la théorie de la chaleur et la théorie de l’optique physique). Le programme qui s’exprime par cette expression n’est pas seulement une sollicitation de prendre en compte l’histoire de la science en poursuivant la philosophie des sciences, mais de réfléchir comment la science progresse d’une description indirecte (concrète) des faits à partir de la connaissance quotidienne à une description de plus en plus directe (abstraite) qui implique aussi le remplacement des sensations par d’autres signes. J’illustrerai cette méthode par « La Théorie de la chaleur » de Mach.

Alexandre Métraux
Ernst Mach: portrait du physicien en autophilosophe

Quand Ernst Mach analyse un phénomène optique extraordinaire, inattendu, donc non-prévu par les théorèmes tenus pour vrais, il se fait instrument enregistreur, qui entre en concurrence avec les instruments optiques (appareils photographiques). C'est de cette concurrence que le physicien savant tire profit pour re-définir la sensation et le rôle que celle-ci joue dans les démarches épistémologiques et philosophiques.

Sophie Roux
Histoire et histoire des sciences selon Gilles-Gaston Granger

Si la question de savoir en quoi l’histoire des sciences est une histoire a été une question pour tous les bachelardiens, elle s’est posée de manière particulièrement cruciale à Gilles-Gaston Granger. Il soutenait en effet que l'histoire vise, soit directement, soit par des modèles superposés, à restituer la singularité d'une expérience, et que l’histoire des sciences révèle des structures qui manifestent une forme de nécessité. Le propos de l’exposé sera dans ces conditions d’identifier le concept d’histoire en jeu dans l’histoire des sciences telle que la concevait et telle que la pratique Gilles-Gaston Granger.

Léna Soler
Philosophie des sciences - Histoire contrefactuelle des sciences : des relations fécondes illustrées via l’analyse d’un cas en mécanique quantique

L’exposé illustrera, sur un cas particulier mais significatif relevant du domaine de la physique quantique, comment la philosophie des sciences peut, vis-à-vis de certaines questions, interagir avec l’histoire contrefactuelle des sciences pour en tirer d’intéressants enseignements épistémologiques.

La question philosophique ici considérée s’identifiera à « l’inévitabilité » versus la « contingence » des résultats validés par la science. Cette question, introduite sous ce lexique par Ian Hacking au début des années 2000, est dotée d’enjeux épistémologiques importants. Elle sera ici appliquée au domaine de la physique, en retenant, au titre de « résultat validé par la science », la mécanique quantique actuellement en vigueur (notée SQM comme ‘Standard Quantum Mechanics’). La théorie quantique correspondante, dont les bases ont été posées au tournant des années 1930, et qui est souvent qualifiée de « révolutionnaire », a été explicitement présentée par ses premiers promoteurs comme inévitable. Depuis, elle se trouve presque invariablement traitée – par les Manuels et les cursus scientifiques, par les médias et approches vulgarisées, quand ce n’est pas par les philosophes des sciences – comme « la » théorie physique qui devait inévitablement s’imposer sur la base des nouveaux résultats expérimentaux devenus disponibles au début du 20ième siècle.

En vue de discuter la question de l’inévitabilité ou de la contingence de SQM, l’histoire contrefactuelle sera mise à contribution. Plusieurs scénarios historiques « virtuels », différant de l’histoire effective de la physique quantique sous des aspects spécifiés, seront construits, qui, tous, aboutissent à l’adoption d’une physique quantique « alternative » incompatible avec SQM à des égards significatifs. Je soutiendrai que les séquences contrefactuelles mises en jeu sont, d’une part, plausibles d’un point de vue historique – elles auraient pu être « réellement » instanciées –, et, d’autre part, légitimes d’un point de vue épistémologique – elles ne sont pas réductibles à des fautes méthodologiques, des erreurs théoriques, ou quoi que ce soit de cet ordre.

Si de telles séquences alternatives avaient été empiriquement réalisées à la place de la séquence historique effectivement advenue, nous adhèrerions à une physique microscopique d’une part magnifiquement étayée par l’expérience, mais d’autre part incompatible avec « la » mécanique quantique aujourd’hui instituée comme « la bonne » ou « la seule option viable » en l’état de la recherche. Ainsi, l’argumentation contrefactuelle conduit, dans ce cas, à accorder crédit à la thèse de la contingence : à l’idée que « la » mécanique quantique SQM qui règne en maître depuis presque un siècle n’était pas inévitable, ni en fait, ni en droit.

Jean-Jacques Szczeciniarz
5 relations entre Histoire et Philosophie des Sciences (identité, contradiction, contrariété, exclusion, incompatibilité, indifférence mutuelle (immédiate, ou construite))

Je vais me mouvoir entre ces deux disciplines au moyen des relations que j’ai proposées de manière semi arbitraire. Mais le problème posé reste celui de la nature de la distinction si elle existe, entre ces deux disciplines. J’en choisis deux.

A- L’identité peut se manifester sous deux formes. Ou bien la philosophie des sciences absorbe l’histoire des sciences. La position philosophique qui subsiste à cette digestion est alors celle d’un historicisme pour lequel la diachronie sous la domination de la synchronie explicitée reste avec l’histoire dans la gorge du philosophe. Ou bien cette dernière est considérée comme une forme synchronique qui s’ignore. La position extrême autre identité, consiste à faire disparaître la philosophie comme entreprise propre dans une histoire des sciences qui revendique d’être conceptuelle.

B- À l’inverse l’exclusion mutuelle visant à sauvegarder l’autonomie des deux disciplines, implique deux positions. Du point de vue des historiens on pratique une sorte de chasse aux sorcières philosophiques, considérant la pratique philosophique comme une entreprise illusoire réduite à effacer la positivité de l’histoire avec ses problèmes et ses méthodes. Une autre attitude consistant à utiliser la philosophie et ses analyses forcément partielles comme pouvant aider à éclairer par-delà ses illusions l’histoire elle-même dans sa positivité ; la toxicité de la philosophie ayant de la sorte été neutralisée.

Du côté de la philosophie, autre exclusion, l’histoire dans sa factualité ne peut qu’être un matériau à analyser pour en déterminer les conditions philosophiques d’apparition. Mais la construction philosophique se développe sur la base d’une négation de l’histoire sous quelque forme que ce soit. Les questions doivent d’abord se poser « en soi ».

L’exposé tentera sur quelques exemples d’expliciter les raisons de cette configuration théorique en usant des quelques autres relations proposées.

 

Manifestation organisée par le Comité National Français d'Histoire et de Philosophie des Sciences et des Techniques

Avec le soutien des Archives Henri-Poincaré, du Laboratoire Sciences, Philosophie, Histoire (UMR 7219, Université de Paris-Denis Diderot/CNRS) et du projet ANR/DFG FFIUM