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Images et diagrammes en physique et mathématiques

Jeudi 12 mars 2009 - 09:00 - Vendredi 13 mars 2009 - 18:00
Nancy - Faculté de Sciences
Argumentaire: 

L'objectif est d'envisager la question de l'usage et de l'interprétation des images et des figures en Mathématiques et en Physique sous les angles historique et philosophique. Quel type d'information en tire-t-on ? Quelles sont leur signification réelle ? Comment influent-elles sur la démarche scientifique, la pédagogie ? Quel rôle jouent-elles sur la réception des productions scientifiques ?

Programme: 

 

  • 10h00 : Anouk Barberousse (Institut d'histoire et de philosophie des sciences et des techniques, Université Paris 1)
    Epistémologie des images scientifiques (PDF, 4.8 Mo)
    L'analyse épistémologie des images scientifiques est encore un domaine en friche. Cet exposé vise à en proposer quelques aspects. Je m'appuierai uniquement sur des images publiées, quel que soit le support, en insistant sur leur importance quantitative, leur grande variété diachronique et synchronique. Je montrerai la nécessité de prendre en compte l'épaisseur historique de cet objet d'étude, qui existe depuis cinq siècles, ainsi que le fort impact des traditions iconologiques et techniques dans la production d'images scientifiques. Je présenterai quelques outils qui ont été développés pour comprendre les images scientifiques, en soulignant leur faible développement par rapport à ceux dont nous disposons pour comprendre les textes. Ces outils viennent principalement de la psychologie de la perception et de la philosophie des images. Ils ne peuvent être performants que si on prend au sérieux l'insertion des images scientifiques dans un tissu argumentatif. Je m'attacherai à montrer l'importance des divers aspects du contexte qui donne leur donne leur sens.

  • 11h00 Marie-Odile Berger (LORIA, Nancy)
    De l'image à la reconnaissance: quelques étapes marquantes (PDF, 3.3 Mo)
    L'idée d'automatiser l'interprétation des images est apparue dès les années soixante, avec des objectifs annoncés souvent très ambitieux qui se sont par la suite révélés bien difficiles, voire impossible, à atteindre. Les premières approches consistaient à faire des calculs à partir de l'image et à construire des représentations symboliques, d'abord en deux dimensions, comme sur l'image, puis tridimensionnelles, pour tenter de restituer une description proche de notre propre vision. Devant les limites des représentations symboliques, d'autres approches visant à modéliser directement, et le plus souvent géométriquement, les objets ont vu le jour mais ont souvent manqué de la généricité nécessaire à la description de la variabilité au sein d'une famille d'objets. Les modèles les plus récents sont issus de l'apprentissage et permettent d'apprendre cette variabilité tout en liant photométrie et géométrie, permettant ainsi de décrire un modèle directement en terme d'éléments présents dans l'image. Dans cet exposé, nous présenterons quelques étapes marquantes de la reconnaissance d'objets qui illustrent le cheminement des idées dans cette discipline.

  • 14h00 : Ileana Chinnici (INAF/Osservatorio Astronomico di Palermo)
    Les images du ciel au XIXe siècle : des atlas célestes à la Carte du Ciel (PDF, 48.6 Mo)
    L’astronomie est, par définition, une science associée à l’action de « regarder » le ciel et d’en obtenir des images, ou bien des représentations mathématiques ou symboliques des observations. On pourrait dire que tout le développement technique dans la science du ciel est miré à l’obtention d’ « images » de plus en plus nettes et parfaites des objets étudiés et de leur émission électromagnétique. L'idée de représenter le ciel par des images est bien ancienne et elle a eu sa première application dans le regroupement des étoiles en constellations. Cette représentation du ciel a été tellement efficace qu’elle a été conservée et étendue par la création de nouvelles constellations jusqu’au XIXe siècle. Les atlas reproduisaient donc le ciel par les images des constellations, chaque étoiles étant représentée par des symboles conventionnels en indiquant la grandeur et parfois la couleur. L’utilisation des images ne se bornait pas seulement à la description des positions de astres mais aussi aux phénomènes qu’on observait dans le ciel : comètes, éclipses, aurores polaires furent l’objet de plusieurs observations reproduits généralement par dessins. L’introduction des techniques photographiques dans le domaine astronomique fit envisager aux astronomes de l’époque la possibilité d’obtenir des images « exactes » du ciel et de ses phénomènes - et de transformer aussi les mouvements des astres en images. Pour fixer la position des astres on était donc en mesure d’obtenir non plus un atlas, mais une carte photographique complète du ciel, dont la réalisation impliquait toutefois un effort commun de la communauté astronomique. Ce but est à l’origine de l’entreprise internationale de la Carte du Ciel, lancée en 1887 par l’Observatoire de Paris, dans laquelle s’engageront dix-huit observatoires des deux hémisphères – un projet qui restera inachevé mais qui montre l’importance reconnue par les astronomes de l’époque de l’idée d’obtenir une « image exacte » du ciel.

  • 15h00 : Gilles Cohen-Tannoudji (CEA, Paris)
    Les diagrammes de Feynman, la partition du modèle standard (PDF, 150 ko)
    A la fin des années quarante, Feynman a reformulé la mécanique quantique au moyen d'une intégrale fonctionnelle, l'intégrale de chemins.Cette nouvelle formulation, qui peut s'écrire au moyen des diagrammes et amplitudes de Feynman est bien adaptée à la théorie quantique des champs qui unifie mécanique quantique et relativité restreinte. D'abord appliquée avec un succès spectaculaire à l'électrodynamique quantique, la théorie quantique des champs a débouché sur le modèle standard des interactions fondamentales non gravitationnelles. Les diagrammes de Feynman sont en quelque sorte les notes de la partition de ce modèle standard.

  • 16h00 : Pause Café

  • 16h30 : Vincent Bontems (Service de Physique de l'Etat Condensé, CEA)
    Les enjeux éthiques des images des nanotechnologies (PDF, 592 ko)
    Les nanotechnologies sont souvent caractérisées par l’abondance et l’importance des images qui circulent à leur propos au sein et hors du champ scientifique. Dans le champ scientifique, une « image » correspond à tout type de mise en forme non-textuelle servant à l’interprétation de données et à la construction des connaissances. On retiendra surtout l’imagerie produite par infographie à partir de microscopes à sonde locale (STM, AFM). En suivant la circulation de ces images hors du champ scientifique, on observera la transformation des fonctions qui lui sont dévolues. Les fonctions cognitives sont supplantées par la qualité esthétique de l’image. La modification des conditions d’interprétation de l’image souligne les enjeux éthiques de la circulation des images produites par la science en tant qu’elle affecte l’image de la science.

  • 17h30 : Scott Walter (Archives Henri Poincaré, Nancy)
    Les premiers modèles de la cinématique relativiste (PDF, 1.3 Mo)
    À la fin du XIXe siècle, l'optique de précision, la naissance de la microphysique et un réexamen des fondements de la mécanique ont mené à une crise sans précédent en physique théorique. En 1905, Albert Einstein a trouvé un moyen de se débarrasser de l'éther, à partir d'hypothèses cinématiques qui menaient à la transformation de Lorentz. Or, aucun dessin n'a illustré la cinématique d'Einstein, à la différence d'une autre cinématique, développée indépendamment par Henri Poincaré, et d'une troisième cinématique introduite en 1907-1908 par Hermann Minkowski. La comparaison de ces cinématiques et diagrammes et de leur emploi par les scientifiques nous permet de mieux saisir le rôle des illustrations dans l'élaboration et la diffusion des concepts abstraits.

Vendredi 13 mars
  • 9h00 : François Chargois (Institut Elie Cartan, Nancy et Archives Henri Poincaré, Nancy)
    Histoires de diagrammes
    Dans les années cinquante se répand l'usage, dans les textes mathématiques, notamment en théorie des catégories, en algèbre homologique, en topologie algébrique, de petits dessins, bientôt baptisés diagrammes. A l'origine simples auxiliaires du discours mathématique, reflets de situations plus ou moins complexes destinés à étayer une argumentation algébrique, de même qu'une figure peut venir soutenir et éclairer un raisonnement géométrique, ces diagrammes accèdent rapidement au statut d'objet mathématique. L'exposé tentera de retracer ce cheminement.

  • 10h00 : Amirouche Moktefi (IRIST, Strasbourg - LHSP Archives Poincaré, Nancy)
    Venn et compagnie : raisonner (correctement) avec des figures 
    L’usage des diagrammes en logique est ancien. Certaines représentations comme le carré des oppositions ou l’arbre de porphyre permettaient déjà de représenter des relations logiques entre propositions. L’usage de diagrammes pour "inférer" est en revanche plus récent. C’est le cas des désormais célèbres diagrammes de Venn, communément appelés "patates", et largement utilisés aujourd’hui, notamment en théorie des ensembles. Le principe est de représenter des classes d’objets par des cercles (ou tout autre figure close) puis de représenter les relations logiques entre les classes par des relations topologiques entre les cercles. Il existe cependant en réalité deux types de diagrammes, très différents et pourtant souvent confondus, reposant sur ce principe général. Le premier schéma apparaît dans les /Lettres à une Princesse d’Allemagne/ du mathématicien Léonard Euler (1768), alors que le second a été introduit par le logicien anglais John Venn (justement) en 1880. Dans cette présentation, nous expliquerons ces deux modes de représentation pour en montrer les qualités et les limites. Nous verrons ensuite comment naît à partir de la fin du 19ème siècle, une nouvelle lignée de diagrammes rectangulaires, allant des diagrammes de Carroll aux tables de Karnaugh utilisées aujourd’hui en informatique. A travers tous ces exemples, nous montrerons que la conception de ces diagrammes nécessite une recherche constante d’un équilibre fragile entre l’aide visuelle attendue de ce type de représentations et la puissance calculatoire souhaitée à l’usage. On pourra dès lors se demander si l’on peut se fier à un diagramme pour tirer des conclusions.

  • 11h00 : Pause Café

  • 11h30 : Jean Mawhin (Louvain)
    Spectres physiques et spectres mathématiques : des images qui ont mis du temps à se rejoindre (PDF, 1.8 Mo)
    L'exposé décrit l'évolution de la notion de spectre en physique, de Newton à Bohr, ainsi que l'évolution, plus tortueuse, de la notion de spectre d'une application linéaire en mathématiques, jusqu'à ce que les notions se rejoignent dans la mécanique ondulatoire de Schrödinger.

  • 14h00 : Catherine Allamel-Raffin et Jean-Luc Gangloff (GERLSUP, Strasbourg)
    Objectivité et images scientifiques : une perspective historique (PDF, 2.2 Mo)
    Depuis la Renaissance, les sciences de la nature ont à maintes reprises développé en leur sein de nouveaux modes de production des images scientifiques (dessin, photographie, image numérique). On peut observer que la naissance de chaque procédure ou de chaque dispositif a suscité une vague d'enthousiasme en donnant à penser qu'il était enfin possible, grâce à lui, de parvenir à une objectivité absolue des résultats. Un tel espoir a pourtant été régulièrement déçu. L'histoire des images scientifiques fournit ainsi un cas exemplaire plaidant en faveur d'une conception gradualiste de l'objectivité : cette dernière est affaire de degrés. C'est par conséquent en acceptant de penser en termes de plus et de moins (d'objectivité) (et non de en termes de tout ou rien) que l'on peut comprendre les pratiques quotidiennes des chercheurs, lorsque ceux-ci visent à produire et à exploiter des images au sein de leurs laboratoires.

  • 15h00 : Jeanne Ayache (Institut Gustave Roussy, Villejuif)
    Interprétation des images de microscopie électronique en transmission (PDF, 12.2 Mo)
    A l’époque de la nano ou la nanobio technologie, la microscopie électronique est l’étape indispensable à toute étude de la structure et des propriétés d’un matériau. La base de l’imagerie en microscopie électronique est l’interaction électron-matière. La fonction d’onde résultante transporte toutes les informations de structure et des proprietes de l’objet. Je présenterai quelles types d’informations, sont utlisées pour former une image de structure, de compositon chimique ou de liaison chimique, et comment, à partir de l'image, l’on peut relier la structure aux prorpriétés des matériaux ou les fonctions du vivant. De meme, seront illustrés l’importance des limites de detection, de resolution des microscopes, des artifacts de préparation possibles, sur des exemples dinterprétation d’images prises dans le domaine de la science des matériaux, des sciences de la terre et en biologie.

Comité d'organisation :
Cathy Dufour, Philippe Lombard, François Chargois, Christophe Chatelain, Thierry Gourieux, Dragi Karevski, Bruno Blind

Support financier :
Société Francaise de Physique, IREM, Institut Elie Cartan, Departement de Physique, Ecole doctorale EMMA, Ecole doctorale IAEM, Nancy Université, Région Lorraine