A l’occasion du 150ème anniversaire de la mort d’Arthur Schopenhauer, ce colloque se présente comme une rencontre interdisciplinaire sur l’inconscient schopenhauerien. Le terme d’inconscient se présente sous la plume de Schopenhauer non comme un substantif (comme ce sera le cas chez Freud) mais comme un adjectif servant à qualifier différents aspects de la vie psychique et organique qui ont tous en commun d’échapper à la conscience.
Le premier objectif du colloque sera de cerner les principales applications du terme d’inconscient dans l’oeuvre de Schopenhauer. Il semble (et ce point sera à vérifier) que le terme s’applique :
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aux processus perceptifs qui permettent d’inférer une cause à partir d’un effet sensoriel donné
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aux processus de « pensée » qui interviennent dans la détermination du motif de l’action humaine, processus régis par des associations d’idées mais également par le rapport logique de principe à conséquence
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aux processus de « refoulement » (ou veto de la Volonté) qui tend à soustraire certaines représentations à la conscience
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à l’influence des passions et tendances sur nos jugements et résolutions
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aux fonctions organiques appartenant à la partie végétative de notre être, mises en mouvement par l’excitation et non par le motif
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à la ‘’Volonté’’ elle-même envisagée comme tendance métaphysique fondamentale
Appliqué au processus de la perception visuelle, l’usage schopenhauerien du terme d’inconscient intéresse particulièrement les recherches actuellement menées dans l’axe 2 de notre UMR (histoire et philosophie des sciences) sous la direction de Gerhard Heinzmann, touchant la question des inférences inconscientes impliquées dans la perception. Ces recherches sont actuellement menées dans le cadre du groupe international « Académie Helmholtz » rattaché à notre laboratoire. Lors du présent colloque, l’opposition entre Schopenhauer et Helmholtz sur le statut de la perception visuelle et sur la nature des processus inconscients qui y sont engagés sera l’objet d’une attention particulière. Rappelons que Schopenhauer avait lu la thèse de doctorat de Helmholtz (1852), qu’il cite dans la seconde édition de son livre Sur la vue et les couleurs (1854). De son côté Helmholtz, dans Les faits dans la perception (1878) se démarque nettement de l’interprétation schopenhauerienne de la percpeption visuelle comme processus immédiat, censé échapper au raisonnement et relever de la simple application du principe de causalité.
Un autre point particulièrement intéressant est celui du statut de la Volonté envisagée comme tendance fondamentale inconsciente, s’exprimant à la fois dans le corps et dans l’esprit, et de la pertinence d’une telle notion dans le champ contemporain des neurosciences. Cette étude s’articule à une section importante de l’axe 2 de notre laboratoire, dirigée par Bernard Andrieu (Histoire, Epistémologie et philosophie du corps), en prolongeant les récents travaux réalisés au sein de cette section sur le lien entre la psychophysique depuis la seconde moitié du XIXe siècle et les réflexions contemporaines sur les rapports entre le corps et l’esprit. Par exemple, nous verrons que l’idée d’un traitement implicite et inconscient de l’information trouve des racines solides dans la conception schopenhauerienne des fonctions du cerveau.
Enfin, de récents travaux sur Schopenhauer tendent à réévaluer la place que le philosophe allemand accorde aux processus inconscients au sein de sa philosophie. Ce sont les résultats de ces travaux ainsi que les recherches actuellement menées sur l’actualité de l’inconscient schopenhauerien que le colloque s’attachera également à mettre en lumière, en traitant par exemple la question complexe des rapports entre Freud et Schopenhauer, et celle de l’existence (problématique) d’une pensée inconsciente chez Schopenhauer.
Jeudi 10 juin 2010 (salle G 04)
13h45 – 14h00 : Ouverture par M. Scott Walter, Directeur du MASTER « Philosophie, sciences et arts » de l’Université Nancy 2, membre du LHSP – Archives Poincaré (UMR 7117).
14h00 – 14h45 : Quel inconscient chez Schopenhauer ? Présentation et introduction du Colloque
Jean-Charles Banvoy, allocataire de recherche sur le sujet « L’inconscient selon Schopenhauer : de Kant aux neurosciences. », Université Nancy 2.
15h00– 15h45 : The real essence of human beings: Schopenhauer and the unconscious will
Christopher Janaway, Professor of Philosophy, University of Southampton
16h00– 16h15 : pause
16h15 – 17h00 : Y a-t-il des motifs inconscients ?
Christian Bonnet, Maître de Conférences en Philosophie, Université Paris 1.
17h15 – 18h00 : Peut-on parler d’une pensée inconsciente chez Schopenhauer ?
Christophe Bouriau, Maître de Conférences HDR, Directeur du département de Philosophie, Université Nancy 2.
Vendredi 11 juin 2010 (salle G 04)
9h00 – 9h15 : Accueil – présentation
9h15 – 10h00 : Enjeu métaphysique et religieux de la Volonté «inconsciente» dans la philosophie de Schopenhauer.
Marie-José Pernin, agrégée de l'Université, Docteur en philosophie, professeur honoraire.
10h15 – 11h00 : Schopenhauer entre inconscient psychique et inconscient neuro-cognitif
François Félix, Professeur de Philosophie, Université de Lausanne.
11h15 – 11h30 : Pause
11h30 – 12h15 : Schopenhauer précurseur de Freud ?
Peter Welsen, Professeur de Philosophie, Université de Trèves.
12h30 : Repas à la Pizzeria du R.U.
14h00 – 14h45 : La création artistique selon Schopenhauer : vouloir se souvenir d'on ne sait quoi... En réponse à un article du pianiste Brad Mehldau sur la création musicale.
Patrick Kopp, Professeur de philosophie en Lettres supérieures, Lycée Henri Poincaré, Nancy.
15h00 – 15h45 : L’inconscient cérébral et la physiologie des passions,
Bernard Andrieu, Professeur d’épistémologie du corps et des pratiques corporelles, Université Nancy 1.
16h00 – 16h15 : Pause
16h15 – 17h30 : Table ronde et conclusions du colloque