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Le modernisme après la “crise”. Histoire et actualité du modernisme et de l’anti-modernisme

Jeudi 5 juin 2025 - 09:30 - Vendredi 6 juin 2025 - 17:30
Metz
Argumentaire: 

La "crise moderniste" (1903-1907) a constitué probablement la dernière grande crise ouverte du catholicisme français et européen. Elle a donné lieu à la naissance d'une hérésie nouvelle : le modernisme, ainsi qu’à un système disciplinaire de contrôle de la pensée catholique probablement sans précédent et dont l’influence sera durable. Le “serment antimoderniste” des prêtres ordonnés sera obligatoire jusqu’en 1967. La violence de cette crise, remarquée par tous les acteurs, a fini par masquer le débat intellectuel dont elle a été l’occasion. La répression doctrinale qui s’est abattue ensuite n’a pas permis de rouvrir directement ce débat et a rendu la discussion théologique sur les idées à l'origine de cette crise presque impossible. Cela ne veut pas dire que la réflexion théologique ait cessé dans le catholicisme jusqu’au deuxième concile du Vatican. Cependant, sur les sujets en cause dans le modernisme, en particulier les rapports entre le dogme et l’histoire ou le lien entre la philosophie aristotélico-thomiste et la doctrine catholique, elle n’a pu se faire que médiatement, à travers des études historiques et philologiques (Lagrange, Lubac, Danielou etc.), ou en marge complète de l’institution (Teilhard de Chardin). Même après Vatican II, le modernisme est resté dans la discussion théologique catholique une sorte de tabou. La crise a été bien étudiée historiquement (E. Poulat) et, parfois, philosophiquement (P. Colin), mais le débat théologique est toujours resté discret sur cette question. Pourtant, une question est comme l’éléphant dans la pièce : le concile Vatican II est-il une sorte de victoire posthume du modernisme, qui aurait survécu dans le catholicisme de manière cachée pendant une cinquantaine d’années et aurait finalement pris le pouvoir ? Est-il au contraire son enterrement définitif, via un dépassement des questions qui avaient été posées ? Que faire des documents dogmatiques qui l’ont condamnée en 1907, s’appuyant directement sur les textes de Vatican I et des papes de la deuxième moitié du XIXe siècle ?

Pour clarifier ces questions, il faut donc examiner de front la question non pas seulement de la crise moderniste mais d’une doctrine moderniste, de son devenir après la crise et jusqu’à aujourd’hui. C’est l’ambition de ce colloque, à travers plusieurs axes de réflexion :

  1. Qu'est-ce que le modernisme, et peut-on le définir de manière unifiée au-delà de la diversité des figures qui lui ont été associées (Loisy, Le Roy,Von Hügel etc.) ? Existe-t-il une doctrine modernisme ou n’est-ce qu’une nébuleuse dont l’unité aurait été inventée par le Magistère ?
  2. Comment le modernisme a-t-il survécu et vécu à travers différentes figures catholiques au 20e siècle, et comment les questions posées lors de la “crise moderniste” ont-elles pu réapparaître sous d’autres formes ? On pense ici notamment à la querelle autour de la “philosophie chrétienne” au début des années 1930 ou encore au mouvement de ce que l’on a appelé le “ressourcement” (Nouvelle théologie), mais aussi aux formes contemporaines du thomisme et à leurs fronts polémiques. Quelle fut l’influence du modernisme (et de l’anti-modernisme) sur le concile Vatican II ?
  3. Peut-on défendre quelque chose comme le modernisme aujourd'hui et quelle est l’actualité de la ligne de clivage entre modernisme et anti-modernisme ? Est-elle dépassée, ou au contraire le combat anti-moderniste retrouve-t-il une nouvelle force, avec le reflux, dans le catholicisme, des mouvements théologiques à l’origine du concile de Vatican II, la “reprise en main” orchestrée par le Magistère romain depuis le pontificat de Jean-Paul II et la vigueur nouvelle du néo-thomisme et de l’intégralisme, en particulier aux États-Unis ?

Le colloque se déroulera sous la forme de 4 tables rondes thématiques, comprenant chacune 4 intervenant·e·s qui parleront 20 minutes. Les exposés seront suivis de 45 minutes de discussion.

Comité scientifique : Anthony Feneuil (Université de Lorraine), Isabelle Moulin (Université de Strasbourg), Roger Pouivet (Université de Lorraine), Olivier Riaudel (Université Catholique de Louvain), Ghislain Waterlot (Université de Genève).

Programme: 

Jeudi 5 juin

Table ronde 1 - Le modernisme, histoire et historiographie

  • Denis Pelletier (EPHE) : Réflexions sur le signifiant “modernisme” et son usage
  • Guillaume Cuchet (Paris 1) : Le modernisme a-t-il été inventé ?
  • Andrea Bellantone (Institut catholique de Toulouse) : Réceptions italiennes du modernisme

Table ronde 2 - Du modernisme à nous

  • Marie Gabrielle Lemaire (Namure) : Henri de Lubac et la lutte antimoderniste
  • Yves Meessen : Après le modernisme, assumer l’ébranlement des frontières
  • Olivier Riaudel : Sommes-nous sortis de la crise moderniste ?

Table ronde 3 - La psychologie du modernisme et de l’antimodernisme

  • Paul Clavier : Enjeux du modernisme
  • Augustin Pic : La psychologie du modernisme. Eléments de réflexion
  • Anthony Feneuil : Les incertitudes de la tradition

Table ronde 4

  • Roger Pouivet : pourquoi être antimoderne en philosophie ?
  • Ghislain Waterlot : Antimodernisme vs modernisme aujourd’hui : fausse dénomination et vrai débat
  • Isabelle Moulin : titre à préciser

 

Programme prévisionnel à compléter.

 

Manifestation organisée par Anthony Feneuil, laboratoire Écritures (ER 3943) et Roger Pouivet, Archives Henri-Poincaré - Philosophie et Recherches sur les Sciences et les Technologies (CNRS, UMR 7117).