Icone social AHP

Programme des Grandes conférences 2019-2020

 

Le cycle des Grandes Conférences des Archives Henri Poincaré est conçu comme un espace de rencontre entre chercheurs et grand public.

Il couvre de nombreux champs disciplinaires : philosophie, épistémologie, éthique, histoire des sciences et des techniques, histoire des institutions, sociologie des sciences et des organisations, etc.

Les conférences ont lieu alternativement sur les sites nancéiens et strasbourgeois des Archives Henri Poincaré.

  • Nancy : Université de Lorraine, Campus Lettres et Sciences Humaines de l'Université de Lorraine, place Godefroy de Bouillon, bâtiment G, salle G04, rez-de-chaussée.
  • Strasbourg : Université de Strasbourg, Maison des Sciences de l'Homme - Alsace, 5 allée du Général Rouvillois, salle de visioconférence.

Les conférences ont lieu de 18 heures à 20 heures à Nancy et de 17 heures à 19h30 à Strasbourg.

Entrée libre, dans la limite des places disponibles.

Depuis 2018, les séances nancéiennes sont enregistrées : vous pouvez les retrouver sur le serveur vidéo des Archives Henri-Poincaré à : https://videos.ahp-numerique.fr/video-channels/grandesconferences/videos

 

– Programme des séances –

 

EN RAISON DE L'ÉPIDÉMIE DE COVID-19, PLUSIEURS CONFÉRENCES ONT ÉTÉ ANNULÉES. NOUS ESSAIERONS DE LES REPROGRAMMER ULTÉRIEUREMENT.

 

18 septembre 2019 (à Nancy) | Adrien Barton (CNRS / Institut de Recherche en Informatique de Toulouse)

La méthode réaliste en ontologie appliquée

Résumé : L’ontologie appliquée est un champ à la croisée de diverses disciplines dont l'informatique, et la philosophie. Elle trouve son origine dans l’accélération contemporaine de la production de données à l’échelle mondiale. L’échange d’information entre divers systèmes de traitement des données reste encore souvent difficile. La diversité des formats de données utilisées constitue une première difficulté, d’ordre technique ; mais il existe également une seconde difficulté, d’ordre sémantique. Une base de données est en effet développée par une communauté humaine pour répondre à certains besoins propres ; elle présente donc souvent un défaut de systématicité due à ses idiosyncrasies, ambiguïtés, voire incohérences. Il est par conséquent difficile d’assurer la conservation de la signification de données lors de leur transmission d’un système à un autre : on dit qu’il y a un défaut d’« interopérabilité sémantique ». Une ontologie appliquée définit les catégories d’entités pertinentes pour un domaine du savoir, et énonce des axiomes formels clarifiant les relations entre ces entités, afin de favoriser l'interopérabilité sémantique des données. La méthodologie à suivre en développement d'ontologies a été largement débattue. Dans ce cadre, le débat entre réalisme des universaux, nominalisme et conceptualisme a pris une place importante. Des chercheurs de l'université de Buffalo ont notamment proposé une "méthode réaliste", qu'ils présentent comme faillibiliste, anti-réductionniste et découplée du réalisme des universaux au sens philosophique. J'examinerai dans quelle mesure un tel découplage est effectivement possible, et discuterai la compatibilité de la méthode réaliste avec une position philosophique nominaliste.

Publications récentes d’Adrien Barton : Le Bihan, B. & Barton, A. (2018) "Analytic metaphysics versus naturalized metaphysics: The relevance of applied ontology". Erkenntnis. Barton, A. & Rosier, A. (2016) "Ontologies appliquées biomédicales et ontologie philosophique : un développement complémentaire". Lato Sensu, 3(1), 1-8.

 

23 octobre 2019 (à Nancy) | Peter Lamarque (University of York)

The Experience of Poetry

Résumé : The lecture explores how the idea of experience might apply to literature in general and poetry in particular. Any kind of sensory experience seems at best marginal, for example, to the novel. To speak of the experience of a novel seems not to be speaking of sensory experience. Yet the aesthetic—certainly aesthetic experience—seems closely tied to the sensory. Do we then mean something different when talking of experience in the literary realm? Maybe. But poetry lends itself more readily to talk of experience, aesthetic experience in particular and even sensory experience. Is not much of the pleasure of poetry bound up with the sounds, rhythms and textures of poetic language? And is that not both sensory and aesthetic? Although this might seem incontestable it also hints at a kind of formalism in the aesthetic appraisal of poetry. If our focus is on sounds and rhythms what becomes of poetic subject matter? Is that excluded from aesthetic appraisal? That seems undesirable in itself, especially so for those who promote the indivisibility of form and content in poetry. Can form-content unity in a poem afford aesthetic experience? If so, how is that explained? If not, then are we back to a different kind of experience (more like the novel?) in associating poetry with aesthetic experience?

 

27 novembre 2018 (à Nancy) | Laurence Dahan-Gaida (Centre de Recherches Interdisciplinaires et Transculturelles EA 3224, Université de Franche-Comté)

L’imagination diagrammatique par-delà science et littérature : l’exemple de Paul Valéry

Résumé : En quoi la question du diagramme peut-elle intéresser la littérature ? Peut-on rapporter l’invention en littérature à ce qui se passe dans les sciences ? Existe-t-il un lieu commun à l’invention scientifique et à l’invention littéraire ?  Si le diagramme peut fournir une réponse à ces questions, c’est qu’il est un art de penser, un Ars Inveniendi commun à toutes les activités créatrices, qu’elles relèvent de l’art ou de la science. Paul Valéry croyait à l’existence d’un tel fonds commun, qu’il situait dans  « une logique spéciale des images », support d’une «  méthode imaginative » conciliant la rigueur de la pensée abstraite et le pouvoir de mise sous les yeux de l’image. Cette « méthode" n’est rien d’autre que l’imagination diagrammatique qui, si elle n’est pas nommée expressément, est néanmoins visée par maints textes de Valéry. Exemplaire à cet égard est un essai célèbre de 1937, « L’homme et la coquille », où il tente de résoudre l’énigme posée par la morphogenèse de la coquille. Si cette dernière le fascine, c’est en raison de la résistance épistémologique que sa forme oppose à toute explication par la science de son temps. Elle est la forme stabilisée d’un processus de morphogenèse à l’oeuvre dans la nature, que Valéry voudrait transposer à la poésie. Pour comprendre comment s’effectue le passage du monde naturel au monde du langage, je propose d’analyser l’usage que fait Valéry du mot « figure » dans son essai. La coquille y est envisagée, non pas comme une entité concrète, mais comme « une puissance de figures », une sorte de « matrice » capable d’engendrer une infinité de figures semblables. En cela, elle renvoie au schème kantien qui postule la production d’images mentales à partir de schèmes constitués par l’activité de l’imagination. Le schème n’est pas lui-même une image, mais la représentation d’un procédé ou d’une méthode pour procurer à un concept son image. Le schème est donc une puissance productrice d’images, une puissance d’engendrement, un mécanisme de production de formes. Or si l’on considère que le schème n’est pas un produit pur de l’imagination, qu’il émerge à partir d’« images-objets » (Simondon), qu’il s’agisse d’objets naturels ou d’artefacts, alors il devient possible d’envisager la coquille comme un schème externalisé - ou un diagramme - des forces autopoïétiques qui informent le processus de sa morphogenèse. Il s’agira donc de montrer que la coquille fonctionne  comme une sorte de diagramme des forces à l’oeuvre dans la nature, forces que le logos doit se réapproprier pour produire des formes d’une égale beauté.

Publications récentes de Laurence Dahan-Gaida : « Le diagramme entre esthétique et connaissance », Cahiers Internationaux de symbolisme n°146-147-148 / 2017, p. 42-60. « Forces, formes, figures : théorie de la morphogenèse chez Goethe, Valéry, Theodor Schwenk et Botho Strauss  », in Inscriptions littéraires de la science, Amelia Gamoneda et Victor E. Bermudez (dirs), 2017.

 

29 janvier 2020 (à Nancy) | Jean-Jacques Kupiec (Centre Cavaillès, Ecole normale supérieure)

CONFERENCE ANNULÉE

Et si le vivant était anarchique ?

Résumé : Le déterminisme a toujours dominé en biologie. Avec la génétique et la biologie moléculaire, le vivant a été conçu comme la réalisation d'un ordre codé dans le génome, toute l’activité cellulaire étant supposée dirigée par le programme génétique. Cette vision doit être remise en cause. D’une part, la génétique oscille depuis ses origines entre une  version forte (un gène détermine un caractère d’un être vivant) et une version faible, de nos jours appelée « épigénétique » (le déterminisme du gène est tempéré par d’autres facteurs dont l’environnement). Les biologistes sont pris entre ces deux versions de la génétique, dont la coexistence a pour effet de la transformer en une idéologie infaillible. D’autre part, on a trouvé du désordre partout où l'ordre (le programme) était censé régner dans le vivant, y compris dans le fonctionnement des gènes. Il est temps d’accepter la part anarchique du vivant, c’est-à-dire la variation aléatoire qui en est la propriété première et d’en tirer les conséquences. Il n’existe aucun ordre biologique intrinsèque qui déterminerait la vie. Les êtres vivants ne sont pas des sociétés centralisées de cellules obéissant aux ordres du génome ou de l’environnement, mais des communautés de cellules anarchistes actrices de leur destin, grâce au hasard qu’elles utilisent à leur profit.

Publication récentes de Jean-Jacques Kupiec : Et si le vivant était anarchique ?, Paris, Editions Les Liens qui Libèrent, 2019.

 

5 février 2020 (à Strasbourg) | Ilana Löwy (INSERM, Centre de recherche médecine, sciences, santé, santé mentale, société, Université Paris Descartes)

Diagnostic prénatal et les droits des personnes en situation de handicap

Résumé : Ma présentation va porter sur la tension entre le diagnostic prénatal et certaines revendications du mouvement pour les droits des handicapés. Un avortement pour une indication fœtale (le refus de cet enfant) est présenté aujourd’hui comme plus condamnable qu’un avortement pour rejet de maternité (le refus d’un enfant), puisqu’un avortement pour une indication fœtale est, indirectement, une affirmation que la vie avec un handicap n’a pas de valeur, et que les personnes « imparfaites » ne doivent pas naître. Cet argument, nommé expressivist objection a un avortement sélectif, a une grande puissance émotionnelle. Il est toutefois problématique. Il agrège des handicaps très divers, extrapole des « handicaps exemplaires » (surdité, handicap visuel, mobilité réduite) souvent compatibles avec une vie autonome à tous les handicaps, et évite la question épineuse des soins à des individus sévèrement handicapés, ou plutôt l’argument que la « société » doit procurer de tel soins fait abstraction de fait que dans la pratique, ce sont les familles, avant tout les mères, qui s’occupent des enfants et adultes handicapés. Mon exposé va suivre l’histoire des débats autour l’avortement et le handicap, et leur statut présent, notamment à la lumière du développement des nouvelles approches de diagnostic prénatal, fondés sur l’analyse de l'ADN fœtal extrait soit des cellules fœtales dans le liquide amniotique, soit du sang de la femme enceinte.

  

4 mars 2020 (à Nancy) | Mohammed Ali Benmaklouf (Département de philosophie, Université Paris-Créteil)

La force des raisons : de la logique à la médecine

Résumé : Certaines questions parmi les plus contemporaines – comme celle du « projet parental » pour inscrire l’embryon in vitro dans une lignée humaine, ou celle d’une activité cérébrale détectée par imagerie cérébrale fonctionnelle dans le cas des comas avancés – sont à la fois médicales, existentielles et logiques. Pour les aborder et défaire ainsi les crampes mentales, la conscience apeurée d’un monde livré aux technologies et l’inflation de la parole des experts, il faut procéder à une révision des schèmes conceptuels. Je promeus ici les deux concepts de compréhension et d’énumération comme permettant d’éviter la double réduction du concept au récit, et de l’éthique à de la technique. La démarche que je défends assume que l’éthique n’est pas un savoir, bien qu’elle repose sur un savoir. C’est une éthique intégrative de la science, une éthique relative parce que procédurale, mais non relativiste car elle repose sur des raisons et des alternatives sans cesse évaluées et discutées  ; une éthique qui prend le chemin des aventures conceptuelles de la science, non pour se faire science elle-même, mais pour être suffisamment informée en vue de décrire les dilemmes que les choix humains affrontent tous les jours.

 

11 mars 2020 (à Strasbourg) | Valérie Dufour (CNRS, Institut plurisciplinaire Hubert Curien, Université de Strasbourg)

Les primates non-humains et les corvidés peuvent-ils tenir compte du temps et du risque et des autres, lorsqu'ils s'engagent dans une interaction réciproque ?

Résumé : Les contextes sociaux donnent souvent lieu à de la compétition entre les membres d’un groupe, mais ils offrent aussi de nombreuses possibilités de coopération. L'avantage peut être mutuel si les individus se rendent la pareille. Cependant, se comporter d'une manière réciproque peut être très exigeant sur le plan cognitif, surtout si l'on s'attend à ce que les individus tiennent compte de ce qui a été donné et reçu. La réciprocité d’interactions peut nécessiter plusieurs capacités cognitives telles que comprendre que d'autres ont aussi des besoins (pas nécessairement semblables aux vôtres), que les faveurs ou l'aide ne sont pas toujours échangées immédiatement, et qu'il y a un risque d'échec de la coopération si des partenaires peu fiables sont impliqués. Dans cet exposé, je développerai ces trois facettes de ce que les animaux (surtout les primates et les corvidés) comprennent des interactions réciproques et les techniques expérimentales mises en œuvre. Je conclurai que, contrairement à ce que l'on observe chez l’être humain, la réciprocité dite « calculée » n’est pas à la portée des autres espèces animales.

  

1er avril 2020 (à Nancy) | Corinne Defrance (CNRS, Sorbonne Identités, relations internationales et civilisations de l’Europe)

CONFÉRENCE ANNULÉE

Titre à venir

Résumé : à venir

 

29 avril 2020 (Nancy) | Séance en cours de préparation

CONFÉRENCE ANNULÉE

Titre à venir

Résumé: à venir

 

6 mai 2020 (à Strasbourg) | Stéphanie Ruphy (Institut de recherche de philosophie de Lyon, Université Jean Moulin Lyon III)

CONFÉRENCE ANNULÉE

Les mérites de la démocratie participative sont-ils transposables à la recherche scientifique ? Apports (et risques) des sciences participatives et citoyennes

Résumé : Les formes participatives de démocratie se multiplient aujourd’hui dans nos sociétés, tant aux échelles locales que nationales.  La recherche scientifique ne fait pas exception à cette évolution générale vers une plus forte implication directe des citoyens dans de nombreux domaines de la vie publique et politique, comme en atteste la visibilité et le soutien institutionnel croissant dont bénéficient les « sciences participatives », les « sciences citoyennes » et autres formes d’enquête scientifique mobilisant des citoyens qui ne sont pas des chercheurs professionnels. Dans cette conférence, je discuterai des raisons principales avancées pour justifier le développement des sciences participatives et citoyennes. A quelles évolutions de la recherche scientifique et de son rôle dans la société sont-elles censées répondre ? Existent-ils de bonnes raisons (épistémologiques ou politiques) de résister à cette forme de limitation de l’autonomie de la recherche ? Je dresserai pour cela une cartographie des bénéfices attendus et des risques épistémiques (en particulier en matière d’objectivité scientifique), selon les différentes formes de participation des citoyens à l’enquête scientifique.

20 mai 2020 (à Nancy) | Guy Boistel (Centre François Viète, Université de Nantes)

CONFÉRENCE ANNULÉE

Les calculateurs et calculatrices du Bureau des longitudes (19e-20e siècles)

Résumé : Le projet ANR de numérisation des procès-verbaux du Bureau des longitudes piloté depuis les Archives Poincaré à Nancy, et la « redécouverte » conjointe d’un fonds d’archives inédit du Bureau des longitudes conservé à l’Institut, permettent de reconstruire une part importante de la réalisation pratique, matérielle et humaine d’une des tâches assignées au Bureau par son acte de fondation du 7 messidor an III (25 juin 1795) : la publication des éphémérides de la Connaissance des temps et la nécessaire structuration progressive d’un « Service des calculs » du Bureau au cours du XIXe siècle, rompant avec les pratiques héritées de l’astronome Jérôme Lalande, cofondateur et premier « patron » du Bureau. Il est ainsi désormais possible de reconstituer la liste des personnels recrutés à partir de 1802 comme calculateurs, un statut à l’évolution progressive vers la fonctionnarisation à la fin du XIXe siècle. Dès lors, les questions de discipline, d’organisation du travail quotidien, mais aussi de secours portés aux veuves des calculateurs ou aux calculateurs en mauvaise santé, comme l’accès progressif à la retraite, mais encore les questions de profils et de longévité de carrière, comme de l’accès des femmes à cette activité, peuvent être étudiés sous un angle d’histoire sociale du Bureau. Soucieux de défendre sa publication phare et d’améliorer les conditions de travail et financières de ses calculateurs dans un contexte où il est souvent sommé de justifier son activité, voire son existence, le Bureau des longitudes est amené à composer avec le bon vouloir de son ministère de tutelle et de l’évolution de la réglementation générale du Pays, dans une découverte toujours renouvelée d’une Direction des Ressources Humaines qui ne dit pas encore son nom. L’exposé s’interrogera sur toutes ces questions dans un souci de comparaison avec les pratiques similaires connues dans les observatoires nationaux notamment, mais aussi sur le plan international avec ce que l’on connaît de la gestion de la principale éphéméride concurrente de la Connaissance des temps, le Nautical Almanac anglais.